Les artistes victimes des nazis et du régime de Vichy
L'art dans le camp des Milles
Source : http://memoiresvives.net/2012/06/24/le-site-memorial-du-camp-des-milles/
Le Camp des Milles est aujourd’hui le seul grand camp français d’internement et de déportation qui est préservé et accessible au public. Ce camp a été installé dans une ancienne tuilerie. C’est un camp qui a existé de 1939 à 1942. Il y a eu de nombreux internements d’étrangers et d’antifascistes de 38 nationalités différentes. Tout cela s’est passé sous la troisième République puis sous le Régime de Vichy. Ce lieu est finalement devenu une antichambre d’Auschwitz avec la déportation de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants juifs dans le cadre de la Shoah.
Le camp a connu trois périodes:
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De Septembre 1939 a juin 1940, le Camp des Milles est un camp français pour "sujets ennemis": les ressortissants du Reich y sont internés alors que la plupart d'entre eux sont des sujets antinazis ayant cherché asile en France.
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De Juillet 1940 à Juillet 1942, sous le régime de Vichy, ce camp devient un camp pour les "indésirables". L'État Français de Pétain y transfère des antifascistes, des internés des camps du Sud-Ouest, des juifs ayant fui les persécutions.
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En Aout et Septembre 1942, il devient un camp de déportation des juifs: les juifs de la région sont considérés comme étrangers par Vichy, sont conduits au Camp des Milles pour être déportés dans le cadre de la déportation systématique des juifs d'Europe décidée à Wannsee. On parle donc d'un "Vel d'Hiv du Sud". On constate qu'aux Milles, les déportations ont lieu avant même l'occupation allemande, c'est à dire avant novembre 1942. Cela confirme l’idée développée depuis R. Paxton, selon laquelle le régime de Vichy a collaboré au génocide de façon autonome. Au total, cinq convois sont constitués en partance pour Auschwitz.
Ferdinand Springer est interné au Camp des Milles au début du mois de Novembre 1939. Il raconte que vers 7h du matin, ils étaient réveillés au clairon. Puis ils allaient faire la queue devant deux robinets disponibles pour plus d’un millier de détenus. Ils avaient droit à un café puis étaient livrés à eux-mêmes. Ils n’étaient pas sous alimentés mais souffraient du manque d’hygiène. Il y avait deux robinets d’eau non potable pour tout le camp et l’hiver ils s’y lavaient même s’il faisait –5°C.
Lion Feuchtwanger témoigne qu’il y avait beaucoup de poussière à cause des fours de la tuilerie et que l’air était irrespirable.
A partir du 4 Septembre 1939, le camp est réservé aux hommes. Puis à partir de 1940, il relève de l’administration de l’intérieur, c’est à dire de l’Intendance de Police de Marseille. Il « accueillera » ensuite des étrangers. Jusqu’en Juillet 1942, il est lieu de transit pour les candidats à l’émigration : entre 1939 et 1942, environ 10 000 personnes ont été internées et parmi elles de nombreux artistes (environ 30). La plupart sont de nationalité allemande. Ils ont fui le IIIème Reich pour trouver refuge en France.
Dans ce camp une exposition est dédiée à leur mémoire. Il faut retenir trois figures majeures de l’art moderne :
- Max Ernst, un des pionniers du surréalisme.
- Hans Bellmer, autre grande personnalité de ce mouvement.
- Wols.
Ferdinand Springer croise Wols et Bellmer à Paris, et se retrouvent aux Milles, ou ils se lient d’amitié. Les similitudes entre un de ses dessins, l'Ecorché, et celui de Bellmer, Le Vermoulu et le Plissé, témoignent de leur proximité.
Au moment où la guerre éclate, ces artistes Allemands sont en France dans la zone sud où se sont réfugiés de nombreux intellectuels exilés. En 1922, Ernst s’installe à Paris. Déclaré ennemi du Reich par les nazis, il est destitué de sa nationalité en 1933. En 1939, il est arrêté. Il fera deux séjours au camp des Milles, le premier de deux mois et le second, d’un mois jusqu'à fin 1940.
Springer quant à lui arrive à Paris en 1928. En 1933, à l’avènement du Reich il reste en France. Il sera détenu au camp de Novembre 1939 à Mai 1940.
Wols quitte l’Allemagne en 1933 pour Paris, il devient photographe. Il est interné au Camp des Milles en mai 1940 jusqu'à Octobre 1940.
Bellmer quitte Berlin en 1938. En 1939 il arrive au camp et y reste 5 mois.
L’exposition réunit une cinquantaine d’œuvres papiers, des dessins. Les dessins de Springer offrent un témoignage majeur sur la vie aux Milles, tandis que les peintures d’Ernst proposent une vision minérale pétrifiée de la nature. Les aquarelles de Wols, aux dimensions d’une fine écriture graphique traduisent les peurs qui le hantent. Et Bellmer est représenté par des portraits. On peut donc voir que les artistes internés au camp des Milles ont notamment exprimé leur souffrance quotidienne à travers leurs œuvres car il faut souligner le fait qu'ils vivaient dans des conditions très difficiles.
A cause de son incarcération au camp des Milles (ancienne Tuilerie), Hans Bellmer représente un grand nombre de ses œuvres avec des briques. D'ailleurs ses hommes seront appelés les "Hommes de Briques". Ainsi, plus de 500 œuvres ont été conçues au camp des Milles. Les artistes internés sont imprégnés des grands courants du début du XXe siècle et expriment leur quotidien dans ces gravures.
Pour passer le temps, ces artistes faisaient des œuvres. Certains ne supportaient pas et mettaient fin à leur vie. Leur internement dans ces camps leur a fait changer leur façon d'envisager leur vision de l'art.
Interview de Mr Cheymol (Vice-Président de l’ANACR
(Association des Anciens Combattants et Résistants))
Wols Enfants terrifiés 1940 (Les Milles) Aquarelle. Source : http://masmoulin.blog.lemonde.fr/2012/07/22/wols-au-laac-de-dunkerque/
Hans Bellmer, Tête de femme sur une tour, vers 1940
Source : http://d-d.natanson.pagesperso-orange.fr/artistes_milles.htm
Le Vermoulu et le plissé, 1940 Gravure, signée en bas à droite, numérotée 12/30. 45 x 28 cm (*)
Source : http://catalogue.drouot.com/ref-drouot/lot-ventes-aux-encheres-drouot.jsp?id=2330041
Ferdinand Springer, Ecorché I, 1939-1940.
Source : http://d-d.natanson.pagesperso-orange.fr/artistes_milles.htm




